Après la visite de l’appartement-atelier de Le Corbusier le 14 novembre 2024
Rassemblés sur le trottoir côté Paris, face à la façade de verre du 24 rue Nungesser-et-Coli – le 24 N C -, Michel Triballeau nous donne les premières clés pour la visite de ce lieu privé conçu par Le Corbusier en réponse à une commande, où il travaillé et habité à partir de 1934 avec sa femme Yvonne Gallis. Yvonne Gallis décédera en 1957 et Le Corbusier quittera les lieux en 1965, pour rejoindre son cabanon de 15m² à Roquebrune-Cap Martin où il décédera la même année, à l’âge de 78 ans. L’appartement-atelier est propriété de la Fondation Le Corbusier, l’immeuble est classé Monument Historique et classé au Patrimoine de l’Unesco.
Le 24 N C
Sept étages, 14 appartements – livrés sans cloison- plus un appartement en toit-terrasse : Le Corbusier s’est réservé le 7ième étage et le droit de construire un tout petit appartement sur le toit-terrasse. Structure en béton armé – Le Corbusier est un disciple d’Auguste Perret- encadré par deux immeubles haussmanniens en pierre- façade de verre avec ses fameux pavés de verre Saint-Gobain conçus par Le Corbusier – fenêtres horizontales – querelle avec Auguste Perret pour qui les fenêtres ne peuvent être que verticales. Le bâtiment est une réalisation conjointe de Le Corbusier et de son cousin Pierre Jeanneret. Dans un contexte immobilier difficile, le promoteur demande à Le Corbusier de l’aider pour la vente même des appartements.
A l’intérieur, on est frappé par la modestie des lieux : 240m² sur deux niveaux pour abriter un appartement et un atelier d’artiste. L’atelier donne plein est, tellement lumineux que Le Corbusier a fait remplacer deux fenêtres par des panneaux de bois ; la vue à l’époque, masquée aujourd’hui par le stade Jean-Bouin, devait embrasser tout Paris ; le tout petit bureau, également orienté est, jouxte l’atelier mais n’autorise aucune vue vers l’extérieur avec sa fenêtre en pavé de verre. L’appartement est composé de quelques pièces, de petite à très petite taille comme la chambre d’ami ou la cuisine. Le salon est une pièce ouverte, presque un couloir de passage qui permet l’accès à la salle à manger, d’orientation plein ouest, avec une vue dégagée sur Boulogne et qui embrasse tout l’ouest, des bois de Clamart jusqu’au Mont-Valérien ; à côté de la salle à manger se trouve la chambre à coucher, avec son lit surélevé pour permettre de jouir de la vue tout en restant couché.
Un artiste dans tous les domaines
L’atelier, avec son plafond en forme de voûte, est aujourd’hui une pièce quasiment vide, alors que les photos d’archive montrent un atelier chargé d’esquisses, de livres, d’objets divers, un atelier bien vivant. L’artiste Le Corbusier était un peintre, fondateur du « purisme » avec son contemporain Amédée Ozenfant ; sa première peinture « Cheminée » en est un parfait exemple ; plus tard, on retrouvera l’influence de Picasso dans ses peintures et dessins, comme ceux du hall d’entrée du 24 N C. Le Corbusier était également sculpteur, en ce sens qu’il imaginait des sculptures, réalisées en bois, exécutées par son ami Joseph Savina, et qu’il décorait de peintures colorées. Le Corbusier dessinait également des cartons pour des tapisseries qu’il faisait tisser à Aubusson après intervention de son ami Pierre Baudoin. Pareillement, Le Corbusier imaginait des émaux. Le Corbusier a également beaucoup écrit et publié.
Cet atelier du 24 N C n’est pas l’Atelier Le Corbusier de la rue de Sèvres à Paris – le 35 S aujourd’hui disparu– qui abritait son agence d’architecture où nombre d’architectes travaillaient, parmi lesquels son cousin Pierre Jeanneret.
Un peu de mobilier
La salle à manger est largement ouverte vers l’ouest par de grandes baies vitrées ; un vitrail coloré et aux lignes droites est inséré dans l’une d’elles. Cette salle à manger, où Le Corbusier aimait recevoir ses amis est occupée par une grande table de marbre blanc entourée de fauteuils Thonet, également blancs.
Le salon reçoit le canapé et les fauteuils LC1, LC2 et LC4 que Le Corbusier a dessiné avec Pierre Jeanneret et Charlotte Perriand : tube métallique et cuir.
On notera l’ingéniosité des portes, avec un axe de rotation décalé, qui permet de très grandes largeurs de portes. A noter également la porte de la chambre avec son armoire incorporée côté chambre : pas de place perdue avec du mobilier immobile.
La chambre à coucher, toujours de taille modeste, avec le lit surélevé (à 1.13m du sol ?), une salle de bains avec baignoire sabot pour Madame, une salle de bains avec douche pour Monsieur. Le lit mesure 1m40. La porte de la salle de bains (en jaune sur la photo) se rabat le long du lit et permet d’éviter les chutes !
Le Modulor
Pourquoi 1.13m ? Simplement parce que Le Corbusier définira une nouvelle unité de mesure : le Modulor « à la mesure de l’homme » et dans laquelle 1.13m correspond à la hauteur du nombril d’un « homme normal » mesurant 1.83m. Modulor = module et nombre d’or. Le Modulor sera à la base de toutes les constructions modulaires de Le Corbusier.
Le CDI à l’atelier : un très grand merci à Michel Triballeau
A Garches,
Jean-Michel BUCHOUD