Thème : ARTS Mardi 27 avril 2004
George Sand, la Dame de Nohant et d’ailleurs
Par Georges Poisson – Conservateur en chef du Patrimoine
Une jeunesse entre mère et grand-mère
George Sand, née Aurore Dupin en 1804, est issue de plusieurs lignées familiales exceptionnelles ; un de ses ancêtres fut même maréchal général de France et elle-même a le titre de baronne Dudevant.
Aurore passe son enfance à Paris avec sa mère, fille d’un oiseleur. A la naissance d’un garçon, ils retournent à Nohant mais l’enfant meurt peu de temps après, Son père Maurice meurt également dans un accident de cheval. Aurore se retrouve à Nohant avec deux femmes, sa mère et sa grand-mère, qui se disputent continuellement. Aurore disait : « Ma mère et ma grand-mère s’arrachaient les lambeaux de mon cœur.»
L’enfant mène une vie libre dans les bois, mais Aurore se rebelle contre les disputes incessantes entre les deux femmes. Sa mère décide de l’enfermer dans un couvent. Mais la grand-mère vieillissante rappelle Aurore auprès d’elle. C’est à cette période que la jeune femme monte à cheval habillée en homme. En 1821, à la mort de sa grand-mère, Aurore a dix-sept ans et sa mère la ramène à Paris pour la marier. Ce mariage forcé lui fait horreur. Dans un grand café à la mode, elle rencontre un jeune homme qu’elle épouse en 1822 dans le but d’échapper à sa mère. Elle va rapidement donner naissance à un garçon prénommé Maurice. Son mari Casimir est le maître absolu du domaine et de sa femme.
George Sand supplante Aurore Dupin
Cinq années d’une vie correcte s’écoulent, mais Aurore rencontre Aurélien de Sèze avec qui elle va nouer une amitié amoureuse. Aurore voudrait composer un ménage platonique à trois mais cela n’est pas du goût de Casimir qui se met à boire beaucoup. Elle retrouve un ami qui deviendra son amant. Ils partent en voyage et, en 1828, naît une petite Solange. Aurore prend son indépendance, elle fait chambre à part et y installe ses enfants, un hamac et son secrétaire.
Elle rencontre Jules Sandeau et décide alors de passer six mois de l’année à Paris et six mois à Nohant. Elle demande alors à Casimir 3 000 francs de pension pour les six mois à Paris qu’elle arpente habillée en homme. Très vite, les 3 000 francs de rente ne suffisent pas et pour pallier ses difficultés financières, elle se met à peindre des portraits plutôt ratés. C’est alors qu’elle passe à l’écriture.
Aurore fait la connaissance d’un journaliste qui la fait entrer au Figaro. Jules Sandeau lui trouve son pseudonyme, George Sand, qui vient de la contraction de la moitié de son propre nom. Ensemble, Jules et George écrivent un roman, Rose et Blanche. En 1832, elle publie Indiana, suivi l’année suivante de Lélia. De retour à Paris avec la petite Solange, ils rencontrent des artistes. Ses relations avec Jules se détériorent, elle a besoin de vénérer son amant comme un véritable dieu alors qu’il est faible et fatigable. En 1833, c’est la rupture. D’autres aventures suivront en particulier avec Mérimée, mais ce sera très vite l’échec.
Des liaisons tumultueuses
C’est ensuite avec Alfred de Musset que vit George Sand. Pour elle, la vie en commun est nécessaire à sa vie amoureuse, mais, dans le couple, elle est l’homme. Ensemble, ils partent en Italie et, dans le bateau, rencontrent Stendhal. Mais Alfred se met à boire, à courir les filles et tombe gravement malade. George restera cinq mois à Venise avec le médecin qui soigna Alfred. Néanmoins, elle retourne avec Alfred, partager une liaison tumultueuse et passionnelle. Etant tous deux en quête d’absolu, ils écrivent énormément durant toute cette période. Cependant, leur amour se termine définitivement en mars 1835.
C’est alors que se dessine de plus en plus clairement le souhait de George Sand : être la maîtresse de Nohant. Elle se sépare officiellement de Casimir devant notaire, elle a la garde de Solange et du domaine de Nohant. En 1837, elle retourne à Nohant et termine son roman Maupras.
La grande époque de Nohant
Nohant est la maison des amis. Des visiteurs de marque s’y succèdent, parmi lesquels Balzac, Chopin, Dumas fils, Tourgueniev, Delacroix, Théophile Gautier. Travailleuse acharnée, George Sand écrit huit heures par jour. La Mare au Diable fut écrite en quatre jours.
Ses amours occupent toujours une place importante. En 1837, elle se lie avec Frédéric Chopin, plus jeune de sept ans, avec qui elle entretient une relation cachée, à Majorque aux Baléares. Chopin travaille son piano. Mais, pour des raisons de santé, ils reviennent vivre à Paris, square d’Orléans. Ils mènent une existence heureuse, comme en témoigne un tableau de Delacroix représentant Chopin au piano et George Sand la main posée sur son épaule. Malheureusement, ce tableau sera coupé en deux au moment de leur rupture. Les enfants séparent le couple : Solange qui détestait sa mère fait alliance avec Chopin. Solange rencontre un sculpteur fou qu’elle épouse avant tout pour quitter sa mère.
La fin de sa vie
George Sand devient la muse de la Révolution de 1848. A cette époque, elle se réfugie dans l’écriture et publie notamment La Petite Fadette. Elle vit avec son fils Maurice qui amène beaucoup d’amis. En 1854, Maurice s’adonne à un nouveau divertissement, il crée un théâtre de marionnettes dont sa mère créé les costumes. Lorsque survient le coup d’état de Louis Napoléon Bonaparte, George Sand s’oppose à la politique du Second Empire.
George Sand a enfin trouvé un homme qui prend soin d’elle en la personne de Manceau. D’autre part, à la séparation de sa fille Solange et de son mari, George Sand recueille sa petite-fille Nini et se révèle être une formidable grand-mère. Malheureusement, l’enfant meurt en 1865 et Sand en est déboussolée. Pour la remettre sur pied, Maurice et Manceau l’emmènent en Italie. A son retour, elle se remet à travailler. Malgré la vieillesse, elle reste toujours aussi active et reçoit toujours autant d’amis dont Flaubert.
A 38 ans, Maurice se marie avec une jolie jeune femme de 20 ans qui s’entend tout de suite très bien avec sa belle-mère. De cette union, naît un petit garçon en 1863, qui, hélas, meurt chez le grand-père Casimir. Manceau meurt en 1865, George revient à Nohant où elle est demeurée très populaire. La naissance d’une petite-fille prénommée Aurore fera la joie de ses dernières années.
Pendant la Commune, Sand – déjà âgée de 70 ans – se brouille avec beaucoup de monde. Le 8 juin 1876, elle meurt d’une occlusion intestinale dans des souffrances atroces. Tous ses amis assistent à l’enterrement.
Elle laisse une œuvre immense.
« George Sand, un sacré bonhomme », disait Flaubert.
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