L’HUMANISME CHEZ VICTOR HUGO

Thèmes: Arts, Littérature, Théâtre                                                                                         Conférence théâtralisée du mardi 11 mars 2025

L’HUMANISME CHEZ VICTOR HUGO

Par Madame Pierrette DUPOYET, comédienne, metteure en scène, auteure.

Pierrette DUPOYET reprend ici le thème du spectacle « Les parias chez Victor HUGO » qu’elle a présenté au Festival d’Avignon en 2024. Au cours de la conférence, Pierrette DUPOYET reprend en particulier le rôle de Claude Gueux ; de nombreux extraits de l’œuvre de Hugo sont lus sur scène. Fontine et Cosette sont également évoquées.

INTRODUCTION

Cent-quarante ans après sa mort, la parole de Victor Hugo continue de circuler dans le monde car il se révèle être un écrivain phare impliqué corps et âme dans les questions cruciales soulevées par le XIXe siècle. La préface de sa fresque romanesque Les Misérables fait la synthèse et annonce la portée de sa pensée : « Tant qu’il existera, par le fait des lois et des mœurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation des enfers, et compliquant d’une fatalité humaine la destinée qui est divine : tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l’homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l’atrophie de l’enfant par la nuit, ne seront pas résolus; tant que dans certains régimes l’asphyxie sociale sera possible; en d’autres termes et à un point de vue plus étendu encore, tant qu’il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles. »

Victor Hugo a de nombreuses cordes à son arc mais son rapport à la misère est particulièrement intéressant.

I- Deux personnages clés : Jean Valjean et Claude Gueux.

Victor Hugo (1802-1885) est un homme du XIXe siècle attaché à la paix et engagé socialement. Dans sa vie privée il connaît de nombreuses blessures plus ou moins marquantes comme les trois échecs à siéger à l’Académie Française (il sera finalement élu en 1841) ou la mort de sa fille Adèle en 1849. En dépit de ses positions politiques très marquées, il aura des funérailles nationales et son cortège funéraire sera suivi par deux millions de personnes. Il entre au Panthéon dès le 1er juin 1885.

 Deux de ses personnages montrent combien une rencontre peut changer radicalement le destin d’un opprimé : Jean Valjean et Claude Gueux.

Les deux personnages ont été condamnés à cinq ans d’emprisonnement pour avoir volé du pain. Cependant leur destin est bien différent et cela est dû à une rencontre. 

Évadé du bagne, Jean Valjean est recueilli par monseigneur Myriel, évêque de Digne, qui lorsque son protégé lui vole des couverts en argent, affirmera aux gendarmes venus arrêter Valjean que c’est lui qui les lui avait offerts lui évitant ainsi une condamnation à mort. Face à tant de générosité, Jean Valjean se fait la promesse de ne faire plus que le bien.

L’histoire est tout autre pour Claude Gueux. Simple ouvrier, père de famille et citoyen sans histoire, la misère le pousse lui aussi à voler du pain pour son enfant, ce qui le conduira en prison pour cinq ans. En prison il se lie d’amitié avec un autre prisonnier, Albin, mais le directeur, un homme cruel, déplace Albin rompant ainsi l’amitié des deux hommes. Claude Gueux ne comprend pas cette cruauté gratuite ; quand il demande au directeur pourquoi il a séparé les deux amis, le directeur répond inlassablement « parce que ». Las et désespéré, Gueux prend la décision de tuer le directeur. Il le prévient de son intention et le jour dit, il le tue à coups de hache, devenant par là même un assassin. A son procès, quand on lui demande pourquoi il a commis ce geste, il répond simplement « parce que ». Condamné à mort, il sera exécuté.

La rencontre avec un homme bon pour Jean Valjean et un homme cruel pour Claude Gueux font basculer leurs destins respectifs. La rencontre de Jean Valjean avec Fantine fera aussi basculer le destin de cette dernière et par conséquent de sa fille Cosette également.

Victor Hugo a toujours été préoccupé par l’enfance. Rappelons que jusqu’à assez récemment, il existait des bagnes pour enfants que l’on appelait Maisons de correction. Pour Hugo, le manque d’instruction mène au crime et au vol, il affirme que « faute d’éducation on jette dans la société des animaux ». Il écrit : « l’École, en or, transforme le cuivre ; l’ignorance, en plomb, transforme l’or ». Son implication envers les enfants apparaît également lorsqu’il est député et cherche à faire réduire la durée légale du travail des enfants de 16 heures à 10 heures, ce qui paraît alors inenvisageable. Cette proposition est farouchement combattue par un autre député Louis-Jacques Thénard. L’écrivain se vengera de son opposant en nommant « Thénardier » l’exécrable aubergiste de son roman Les Misérables.

Le personnage de Claude Gueux sera repris par Robert Badinter, -ministre qui a fait abolir la peine de mort en 1981-, et admirateur de Hugo. Pour Badinter comme pour Hugo, la prison ne prive pas seulement de liberté mais détruit un homme psychologiquement, elle en fait une autre personne, un assassin dans le cas du personnage de Hugo. Aussi bien Hugo que Badinter cherchent à montrer la nécessité d’éduquer plutôt que de punir.

II- Les parias physiques

Hugo s’est intéressé à toutes les tares de la société. Ainsi, si Jean Valjean et Claude Gueux sont des parias sociaux, Victor Hugo a aussi créé des parias physiques comme Quasimodo dans Notre Dame de Paris ou Gwynplaine dans L’homme qui rit. Pour Quasimodo, son handicap est de naissance – il est bossu, borgne et boiteux- et Victor Hugo forcera encore le trait en le rendant sourd à force d’être le sonneur de cloches, Gwynplaine lui, est victime innocente de la violence des hommes. L’enfant est défiguré pour en faire commerce tel un animal de foire. Sa difformité donne l’impression qu’il rit en permanence, ce qui provoque l’hilarité générale. Lorsque Gwynplaine, qui se révèle être le fils d’un noble, dénonce à la Chambre des Lords la misère sociale de l’Angleterre, l’assemblée se moque de lui et le traite de clown, rendant sa lutte inutile voire ridicule. 

CONCLUSION

Hugo cherche toujours à expliquer plutôt qu’à excuser. Il a mis la quête de la bonté et de l’humanisme dans toute son œuvre. Hugo ne dénoncera pas les injustices de la société de son époque uniquement dans ses textes mais il affrontera ses opposants directement à l’Assemblée. Sa lutte est poignante et cela explique le rayonnement de ses œuvres jusqu’à nos jours et à travers le monde.

 

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