SÉDUCTION ET POUVOIR : L’ART DE S’APPRÊTER À LA COUR DES RÈGNES DE LOUIS XIV À LOUIS XVI

Thèmes: Arts, Histoire                                                                                                                              Conférence du mardi 1er octobre 2024.

SÉDUCTION ET POUVOIR : L’ART DE S’APPRÊTER À LA COUR DES RÈGNES

DE LOUIS XIV À LOUIS XVI

Par Madame Irène PARION, guide conférencière et historienne de l’art.

INTRODUCTION

De tous temps l’habillement a été un moyen d’afficher son rang social et les vêtements apportent beaucoup d’informations sur la société et les mœurs d’une époque. Ceci est particulièrement vrai à la Cour de Versailles sous le règne de Louis XIV. A l’époque du Roi Soleil, tout est extrêmement codifié et l’art du paraître atteint son paroxysme. La mode est un moyen de communication et permet aussi d’affirmer son pouvoir à la Cour, les courtisans marquant leur statut par l’art du paraître. La difficulté majeure, très paradoxale, consistait à respecter les codes, très rigides, tout en se démarquant grâce à une certaine originalité.

Les accessoires sont tout aussi importants que les vêtements. On entend par accessoires aussi bien les perruques que les bijoux, le maquillage ou le parfum ou ce que l’on appelle la « galanterie de poche ».

I Les perruques.

Aux XVII et XVIIIe siècles on entend par coiffure tous les accessoires et les montages que l’on porte sur la tête. La définition de la coiffure à cette période très différente de maintenant, c’est davantage « une couverture, ajustement, ornement de la tête » qu’une coupe, une couleur, une tresse.

On ne s’apprête pas ou ne se coiffe pas de la même façon selon son âge ou son statut, certaines coiffures par exemple sont réservées aux jeunes filles, d’autres aux femmes plus âgées ou aux veuves.

Le bonnet servait de base sur laquelle on vient poser diverses choses : mèches de cheveux, boucles, rubans etc. Au début du XVIIe siècle, on utilise également beaucoup le chaperon à pointe ou la coiffe de soie arrivant sur le haut du front.

Les coiffures comme les vêtements évoluent, ainsi on passe de la coiffure plate avec une frange sur le front surnommée garcette ainsi que deux bouffons crêpés sur les oreilles et une finition par un chignon de nattes à l’arrière de la tête aux coiffures hurlupées dites « à la Hurluberlu»  pour arriver à la fin du règne de Louis XIV, et surtout sous Louis XV, aux coiffures des « petites têtes » qui consistaient à ramener tous les cheveux sur le haut du crâne et former des petites têtes avec les mèches. Toutes les coiffures comportent des éléments décoratifs comme la coiffure « à la Fontanges », véritable échafaudage extravagant de nœuds et de rubans.

Sous Louis XIV la perruque masculine est très lourde et imposante, les cheveux sont bouclés et couvrent les épaules. La perruque s’allège sous Louis XV, notamment à la demande des militaires, souhaitant plus de commodité pour leurs manœuvres. La masse de cheveux est moindre et la chevelure est coiffée en catogan. Vers 1700 on commence à poudrer les perruques en blanc, souvent avec des produits qui étaient toxiques, comme le blanc de céruse ou autres poudres et dérivés du plomb.

L’importance de la perruque était telle que Louis XIV donna un statut particulier aux barbiers et perruquiers : ils étaient 200 en 1673 à Paris et jusqu’à 945 en 1771.  Ces derniers rivalisaient de créativité afin de travailler pour la Cour. Cette course à l’originalité mena à certaines extravagances comme la coiffure « à la Belle Poule », véritable réplique du bateau qui inspira cette coiffure. Cherchant à faire des montages toujours plus hauts, les coiffeurs créèrent les poufs qui pouvaient atteindre une hauteur imposante et pouvaient s’avérer dangereux en raison du nombre d’aiguilles qui permettaient de fixer la coiffure.

II Le maquillage.

Le maquillage comportait les fards, les rouges, poudres et onguents mais aussi les mouches. Les mouches, faites essentiellement dans du taffetas ou du velours noir puis travaillées (taillées puis gommées) afin qu’elles ne s’effilochent pas, servent à cacher les divers défauts de la peau (cicatrices, boutons etc.) mais aussi à embellir ou rehausser la blancheur du teint. Elles sont très codifiées et portent même un nom différent selon l’endroit où elles sont placées. Ainsi, « la passionnée » se posait près de l’œil, « la baiseuse » au coin de la bouche, « la coquette » sur la lèvre, « l’effrontée » sur le nez et « la majestueuse » sur le front. La taille de la mouche variait selon le lieu où l’on se rendait. Les plus grandes étaient pour les bals car l’éclairage était faible et il fallait que la mouche soit vue de loin. La mouche était considérée comme l’ultime touche de raffinement de la toilette. Le maquillage cherchait à rendre le teint le plus clair possible car la blancheur était synonyme d’oisiveté et de noblesse. La bouche devait être très rouge et les sourcils noirs.

III Le parfum.

A la Cour on cherche à tout contrôler et donc aussi les odeurs, ce qui était un véritable luxe à une période où l’on se méfiait de l’eau. Contrairement à nos jours, il n’y a pas de distinction entre les parfums féminins et masculins. Les courtisans se pliant à la mode, ils portent tous des parfums aux notes communes. Les senteurs florales et légères sont les plus prisées comme le citron, la bergamote, l’iris et la rose sous Louis XV. A la Cour du Roi Soleil, à l’inverse, la mode est davantage aux parfums musqués et entêtants.

Le parfum est acheté chez les parfumeurs, qui sont quelques 250 à Paris, dans des flacons simples puis versés dans de somptueux flacons en verre ou porcelaine et richement décorés. Le décor de ces flacons suit la mode : décors fleuris, inspirés de la nature sous Louis XV et plus inspirés de l’Antiquité sous Louis XVI.

C’est grâce à Colbert que la France devient le pays du luxe car auparavant aussi bien les contenants que le contenu venaient d’Italie, véritable synonyme de raffinement en matière de parfumerie et de dentelle. Les boîtes pour le maquillage ou les divers accessoires comme les pomanders (les pommes de senteur), dont les productions allemandes sont particulièrement recherchées ou les coffrets à parfum, sont tout aussi richement ornés que les flacons. On utilise des matériaux nobles tels que l’or, la nacre ou le cristal. Ces objets sont souvent offerts aux monarques et ambassadeurs en visite à Versailles car très onéreux et symboles du luxe et savoir-faire à la française.  Les nécessaires de poches comme les tabatières, les étuis à cure-dents ou les étuis à messages sont aussi richement ornés.

IV Dentelles et boutons.

Tout au long du XVIIe siècle mais aussi au XVIIIe bien que dans une moindre mesure, la dentelle est un élément essentiel de la toilette. La dentelle est omniprésente aussi bien dans les vêtements féminins que masculins et même sur les tenues ecclésiastiques. La dentelle est si importante qu’elle sert de monnaie d’échange contre des matières premières. Colbert développera considérablement la production de dentelle française (cf. la manufacture d’Alençon, de Beauvais…). A partir du milieu du XVIIIe siècle la dentelle devient un ornement essentiellement féminin.

Un autre élément essentiel à l’embellissement des vêtements est le bouton qui peut être fait dans des matières nobles telles que la nacre ou l’ivoire ainsi que la broderie réalisée avec des fils d’or ou d’argent dans le cas des vêtements d’apparat. Les gilets masculins sont particulièrement travaillés. Au milieu du XVIIIe siècle, un Strasbourgeois, Frederick Strass crée des éléments décoratifs en verre qui sont particulièrement brillants. Ce sera un succès total. Les boutiques de merciers sont très populaires comme le montre la toile de Watteau, L’enseigne de Gersaint (1720)

 

CONCLUSION

Du règne de Louis XIV à Louis XVI, le Roi et les courtisans qui cherchent à l’imiter, imposent des codes vestimentaires stricts. Les toilettes sont le reflet du statut social de chacun. Grâce au Roi Soleil et à Colbert, la France devient le pays symbole de raffinement et de luxe, statut qu’elle garde jusqu’à nos jours.

Bibliographie

Roche, Daniel, La culture des apparences : une histoire du vêtement XVII et XVIIIe siècles, Paris, Fayard, 2007.

Catalogue de l’exposition Séduction & Pouvoir L’Art de s’apprêter à la cour aux XVII et XVIIIème siècles ; Coédition Musée du Domaine royal de Marly / In Fine éditions d’art

Remarque :

la photo des perruques est extraite du catalogue de l’exposition

la photo du tableau L’ enseigne de Gersaint a été prise sur internet

 

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