Thèmes: Economie, Sciences, Société Conférence du mardi 5 novembre 2019
Par Madame Elizabeth BARDONNAUD, Maître de conférence à l’Université des Sciences de Montpellier.
INTRODUCTION
Dès l’Antiquité l’Homme a utilisé les arômes mais on ne réalise des arômes au niveau industriel que depuis un siècle et leur utilisation connaît un essor fulgurant sur les cinquante dernières années. L’industrie alimentaire est le plus gros consommateur d’arômes aussi bien naturels que de synthèse. Cependant, d’autres domaines, notamment l’industrie pharmaceutique, utilisent les arômes bien que ce soit dans des proportions bien plus faibles.
I – Pourquoi utilise t-on des arômes?
Les arômes sont utilisés pour améliorer ou modifier l’odeur d’un produit. L’arôme peut être considéré comme une odeur mise en bouche. Les arômes sont des composés volatils qui appartiennent aux différentes classes de chimie organique : alcools, aldéhydes, acides etc. Ils n’apportent aucune contribution aux aliments dans lequel ils se trouvent mais jouent un rôle fondamental dans la reconnaissance et le plaisir que l’on tire de la dégustation des préparations culinaires.
La plupart des produits alimentaires pré-emballés sont aromatisés (soupes, sauces, yaourts …) car l’arôme est un des éléments déterminants dans le choix du consommateur. Ainsi, l’arôme est le premier critère de choix pour les produits à boire et le second, après la couleur, pour les autres produits. La cohérence entre l’arôme et la fonctionnalité du produit alimentaire est majeure dans la perception qu’en a le consommateur.
L’arôme fait appel à nos capacités olfactives et gustatives. Le goût est l’ensemble des perceptions gustatives : les saveurs, les sensations tri-géminales, l’arôme et la texture en bouche. Le goût arrive au cerveau en deux millièmes de seconde grâce à la chorde de tympan, le nerf glossopharyngal et le nerf trigemial.
Les arômes ont un impact sensoriel et apportent son identité à un produit. Ils permettent aussi la différenciation d’un produit comme par exemple les divers thés aromatisés (le produit est toujours le thé seuls les arômes sont différents) et ils améliorent l’acceptation d’un produit comme c’est le cas pour les médicaments.
Les arômes ont également un impact technique. Ainsi ils renforcent le profil d’une matière première naturelle, ils substituent partiellement la réduction de matières premières ou des pertes aromatiques lors du traitement thermique ou du vieillissement des produits et enfin ils substituent des matières premières pas toujours satisfaisantes d’un point de vue microbiotique. Cependant, un arôme ne peut en aucun cas substituer totalement des ingrédients tels que le beurre, le sucre ou la poudre de cacao par exemple.
Si l’arôme est essentiel dans l’industrie agro-alimentaire, qu’en ait-il des dosages et des coûts? Le dosage d’un arôme varie selon la matrice. On aura besoin d’une plus grande quantité d’arôme si le produit est gras ou si le produit a subi un traitement thermique comme c’est le cas des biscuits.Quant-au coût il varie entre cinq et cinquante centimes d’euro par kilo de produit fini selon qu’il s’agisse d’un arôme de synthèse ou d’un arôme naturel.
Les arômes naturels coûtent de deux à dix fois plus chers que les arômes de synthèse. Certains arômes sont peu chers comme agrumes, menthe ou épices car on dispose de beaucoup de matières premières alors que d’autres sont très onéreux comme les arômes fruits rouge, viande ou vanille.
II – Qui fabrique les arômes et pour qui?
Les arômes et les parfums sont fabriqués par des sociétés spécialisées qui fournissent les industries agro-alimentaires ainsi que les usines de cosmétiques et les parfumeurs. Ces industries maîtrisent parfaitement les diverses techniques pour concentrer ou extraire les arômes : déshydratation, distillation, entraînement à la vapeur etc.
En 2018, ces sociétés ont réalisé un chiffre d’affaire de 22 milliards d’euros. Les dix plus grandes firmes mondiales, notamment Givaudan et Firmenich, représentent 75% de ce chiffre d’affaire global. Le secteur étant très porteur on prévoit une progression de 6% du chiffre d’affaire pour 2019. Les grandes sociétés telles que Givaudan, le numéro un mondial, s’agrandit en achetant Naturex, le numéro un mondial des arômes naturels. La tendance est à la constitution de groupes de plus en plus puissants. Deux sociétés françaises tirent leur épingle du jeu, ce sont Mane (5e mondial) et Robertet.
Si le secteur des arômes est si florissant c’est qu’ils sont utilisés dans plusieurs domaines. Le premier client des sociétés productrices d’arômes est l’industrie agro-alimentaire. Cette dernière utilise 68 000 tonnes d’arômes rien que pour les boissons et 84 000 tonnes pour les produits pré-emballés. L’industrie pharmaceutique et des compléments alimentaires est également consommatrice d’arômes tout comme les producteurs de produits dentaires (dentifrices et bains de bouche) et de sticks à lèvres. Enfin, sur les dix dernières années le secteur des cigarettes électroniques est devenu un grand consommateur d’arômes.
III – La réglementation.
On distingue les arômes naturels et les arômes de synthèse. Il y a quatre catégories d’arômes naturels. La première comprend les arômes de…. à 100%. La deuxième regroupe les arômes composés à 95% d’arômes naturels et à 5% de molécules naturelles. La troisième catégorie est celle des arômes dont le pourcentage est inférieur à 95% d’arôme naturel et plus de 5% de molécules issues d’autres sources. Et enfin dernière catégorie, celle des produits ayant 100% d’arôme issu de différentes sources naturelles.
Tout arôme comprenant ne serait-ce que 0,1% d’arôme de synthèse ne peut être étiqueté comme « arôme naturel » mais uniquement « arôme ».
L’arôme en lui-même est très puissant et la majeure partie de l’arôme intégré au produit fini se compose d’un principe actif et d’additifs.
En Europe environ 40% des produits aromatisés contiennent des arômes naturels alors que dans le reste du monde les arômes sont quasiment exclusivement de synthèse.
Par ailleurs, l’évaluation du risque est primordiale dans ce type d’industrie. En France elle est assurée par l’ANSES qui est composée d’experts compétents et indépendants qui rendent des avis scientifiques à la demande des autorités.
CONCLUSION
Les arômes sont omniprésents dans notre alimentation pré-emballée dont les sociétés occidentales sont grandes consommatrices. La réglementation concernant les arômes est stricte et les contrôles fréquents cependant le grand public a tendance à un certain scepticisme. Pourtant, notre palais est habitué à ces arômes qui ajoutent une grande part de plaisir à la dégustation de certains produits. La quasi totalité des arômes sont des arômes que l’on trouve dans la nature, ainsi l’arôme le plus vendu est la fraise. Seul exception le Coca-Cola qui est si populaire et qui pourtant ne correspond à aucun arôme naturel.
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