Thème : HISTOIRE ET GEOGRAPHIE Mardi 11 janvier 2005
Le Mont Athos, merveille du christianisme byzantin
Par André Paléologue, docteur en Histoire, Expert consultant auprès du comité pour l’UNESCO
Le Mont Athos se situe à proximité de Thessalonique, en Grèce. En 1963, ce centre monastique de l’église d’Orient a célébré ses mille ans de vie spirituelle ininterrompue. Cette longévité est exceptionnelle, les moines n’ont jamais quitté le Mont Athos depuis le Xe siècle. Le record d’occupants fut atteint en 1905 quand plus de 20 000 moines occupaient le site (dont beaucoup de Russes). Après 1917, les autorités soviétiques interdirent aux moines russes de se rendre sur le Mont Athos. En 1953, le nombre de moines était descendu à 900. Depuis la chute du mur de Berlin, on assiste à un déferlement de jeunes moines venus des pays de l’Est, portant le nombre actuel d’occupants à 10 000.
Quand on parle du Mont Athos, on parle de la chrétienté tout entière. Ce rassemblement avait été réalisé au moment de l’église indivise, quand les catholiques et les orthodoxes n’étaient pas séparés. Au moment de la scission, ces derniers ont dit : « On s’arrête là. Il n’y aura pas de nouveauté jusqu’au moment où on se rassemblera le moment venu. » Ces chrétiens reconnaissent les sept premiers conciles œcuméniques, et seulement ceux-là, comme étant la base de la chrétienté. Quoique étant « le jardin de la vierge », les femmes sont interdites sur le Mont Athos. Pour les Athonites, le diable rôde et s’introduit partout. Afin de s’en préserver, ils interdisent l’accès à tous les imberbes, enfants compris.
Dès le XIe siècle, les chemins de pèlerinage à destination du Mont Athos traversaient l’Europe entière. Les catalans, les bénédictins, les chrétiens de Bohème avaient leur monastère au Mont Athos.
Pourquoi avoir choisi le Mont Athos ?
Le foyer spirituel le plus intense se situait au Moyen Orient. La poussée de l’islam a obligé les pères de l’église chrétienne à traverser la Méditerranée et trouver un endroit propice où s’installer. Cette montagne qui se dresse en pleine mer avec un relief très escarpé était parfaitement adaptée. Au XIe siècle, les moines du Mont Athos décidèrent que les transhumances les dérangeaient. Ils firent creuser un canal pour empêcher le passage des troupeaux, le seul accès possible aux monastères étant par la mer. Les fortifications furent bâties à la fin de l’ère byzantine afin de se protéger d’éventuelles invasions mais elles furent inutiles puisque le site ne fut jamais attaqué et ne subit aucune occupation militaire. Le Mont Athos n’a pas été directement touché par l’Histoire. Par ailleurs, ses paysages n’ont jamais été souillés ni pollués, ce qui explique que le site dans son ensemble soit inscrit dans la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.
Une « république de monastères »
Le Mont Athos est un Etat théocratique organisé sous la forme d’une république confédérale, une « république de monastères ». Pour s’y rendre, il faut obtenir un laissez-passer. Chaque monastère a les caractéristiques de son pays d’origine : les moines russes ont fait un monastère russe, les Serbes ont fait un monastère serbe, les Roumains ont fait un monastère roumain… Le long des sentiers se trouvent des barrières qui marquent la frontière entre un monastère et un autre.
Le fonctionnement du Mont Athos est celui d’une démocratie parfaite, les décisions sont soumises au vote des moines. Toutes les nations y sont représentées mais, en raison de cette organisation, les monastères qui avaient le plus de moines remportaient toutes les élections. Pour que chaque nation puisse se faire entendre, il fut décidé que, tous les quatre ans, un monastère différent prenne la responsabilité de la gestion du Mont Athos. L’organisation monastique chez les orthodoxes est différente de celle des catholiques. Il n’y a pas de hiérarchie ecclésiastique au Mont Athos : un pape, un évêque ou un patriarche y est un moine comme un autre.
En prière permanente
Au Mont Athos, tout est incitation à la prière, à la méditation continuelle. Les moines donnent l’impression d’avoir les idées ailleurs, d’être un peu endormis, mais ils sont en fait en prière permanente. On ne dort jamais au Mont Athos, on prie. Il y a des messes tout le temps, à chaque heure du jour et de la nuit car des calendriers différents cohabitent (julien, byzantin ou chaldéen). Le moine qui refuse de respecter le rythme de son monastère est suivi par des pères spirituels qui le conduisent à trouver le rythme qui lui convient. Au Mont Athos, de nombreux moines « idéo rythmiques » vivent retirés dans la montagne et calquent leur rythme sur celui de la nature.
L’échelle de Jacob est le livre de chevet de tous les moines. Celui qui atteint la trente-troisième marche – alors qu’il n’y a plus d’échelle – se fond dans l’immatériel, dans l’immanence spirituelle. Sept ans après la mort des prêtres, on déterre les corps et on analyse les ossements. Les crânes d’une blancheur parfaite sont placés dans l’ossuaire des monastères car cette blancheur immaculée montre l’extraordinaire valeur du moine. En revanche, les crânes tachés sont mis de côté.
Des édifices en mauvais état
L’iconographie de la mort et de l’apocalypse est très présente dans les monastères orthodoxes. Pourtant les moines du Mont Athos ne respectent pas les fresques superbes qui ornent leurs monastères. Ils ne comprennent pas nos problèmes patrimoniaux. Pour eux, l’art est périssable. Si une fresque ancienne est abîmée, ce n’est pas très grave, il suffira d’en peindre une nouvelle, c’est dans l’ordre des choses. Certains édifices sont en très mauvais état et il a été difficile de les convaincre que certaines fresques devaient être préservées. Il faut bien comprendre que les moines ne sont pas là pour assurer la bonne marche d’un musée mais pour méditer. Question intendance, les moines sont incompétents. Ils n’acceptent pas pour autant la présence d’équipes multiconfessionnelles de défense du patrimoine. La solution est venue de spécialistes nationaux. Les moines ont finalement accepté que des Russes restaurent les monastères russes, que des spécialistes serbes s’occupent des monastères serbes…
En savoir plus …
Coté Livres :
Coté Web :
http://www.skiouros.net/voyages/2002/athos/index.html
http://www.es-conseil.fr/pramona/athos/athos.html
http://www.pagesorthodoxes.net/monachisme/mont-athos.htm
http://www.panoramio.com/photo/901741
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