Thèmes : Archives, Géopolitique, Société Conférence du mardi 6 janvier 1981
CERCLE DE DOCUMENTATION ET D’INFORMATION
« CLUB DU TEMPS LIBRE »
L’agriculture en l’an 2000 pour les hommes qui ont faim.
Par Marcel MAZOYER , professeur d’agriculture comparée et de développement agricole à l’Institut national agronomique, a ce sujet avec une rare compétence et avec grande ardeur et beaucoup de conviction.
Avant de tenter un résumé de cet exposé – résumé bien difficile à faire – je tiens à donner quelques chiffres :
. La population de la Terre croît d’une manière galopante, en particulier dans le Tiers Monde = au total :
300 millions en l’an 1000,
700 millions sous Louis XIV, 2 milliards avant-guerre, 4 milliards aujourd’hui, 8 milliards vers 2040, 30 milliards vers l’an 3000, Une masse égale à celle de la Terre vers 3500.
C’est de la folie… que des phénomènes régulateurs (famine – épidémies) ne manqueront pas d’assagir.
Cette population est très inégalement répartie :
– aujourd’hui : 97 habitants au Km2 en France, 324 en Belgique, 11 en URSS, 524 au Bangladesh.
– en l’an 2000 : 3 milliards d’Asiatiques, 1 d’Africains (4 fois plus en un siècle), 800 millions d’Américains, 800 millions d’Européens.
. Ressources alimentaires – Elles ne suivent pas le même rythme ; actuellement, elles croissent de 2% par an, alors que la population augmente de 4 à 5%.
Ainsi, la population de la planète devra se stabiliser sous peine de famines catastrophiques.
Les deux problèmes à résoudre sont donc les suivants :
Monsieur MAZOYER commence son exposé en faisant remarquer que l’agriculture du Tiers-Monde n’est pas indépendante des agricultures des autres pays ; toutes les agricultures sont solidaires et il ya lieu d’envisager un système agricole alimentaire mondial.
Il prend comme exemple la « crise du blé » dans les années 1972-73.
Dans l’été 1972, les Etats-Unis et l’URSS s’entendent pour que les grandes entreprises américaines productrices de blé fournissent à l’URSS 10 000 000 de tonnes de blé prélevées sur les stocks américains ; dès le lendemain de la nouvelle, le marché s’envole = les prix du blé sont multipliés par trois.
Les pays pauvres, manquants de devises, ne peuvent acheter ; comme en outre certains ont eu des problèmes de récolte venant des inondations ou de la sécheresse, des famines se déclenchent. Il faut remarquer que ces pays, pour l’alimentation, sont en équilibre instable = inondations et sécheresse les font basculer dans la famine.
En outre, il ya lieu de noter que l’augmentation de 3 du prix du blé a permis de combler les 2/3 du déficit des Etats-Unis ; ainsi, on a utilisé le secteur agricole pour rétablir une situation économique.
Pendant cette crise, les prix européens sont restés stables.
En juillet 1973, le soja a donné lieu à la même exploitation, les USA, étant 1’exportateur absolu.
Comme sa richesse en protéines fait que le soja est important pour la nourriture des animaux, poulets, porcs, vaches, l’embargo a affecté le marché de la viande dont le prix a considérablement augmenté.
Finalement, la zone de famine s’est élargie.
– Considérations sur les rations :
Prenons 3000 calories comme valeur moyenne de la ration alimentaire aujourd’hui :
2000 calories sont d’origine végétale (et 2000 calories végétales les produites)
1000 calories sont d’origine animale (et il faut 7000 calories végétales pour les assurer)
En résumé : pour 3000 calories reçues (et il faut 9000 calories végétales nécessaires)
En 1800 – un Français avait besoin de 2000 calories, presque toutes d’origine végétale (100 à 200 d’origine animale) – aujourd’hui, 9000 – Nous consommons pour 4 personnes de l’an 1800.
Ainsi, avec une population stable, mais de plus en plus gourmande, la consommation peut être croissante. C’est le cas des pays riches et de certains pays du Tiers Monde qui alignent peu à peu leur alimentation sur la nôtre.
. Les Etats-Unis ont élaboré un plan d’expansion agricole qui est un renversement historique de leur politique agricole.
Alors que dans les années 60 on parlait de surproduction et qu’on limitait les surfaces cultivées, quitte à payer aux agriculteurs le manque à gagner (dans les 10%), le plan d’expansion planifié qui envisage des actions génétiques (création de nouvelles espèces) l’emploi intensif des engrais, la culture dans des zones nouvelles, conduit sans doute à une augmentation des prix ; mais ceux-ci restent importants â cause de la grande avance des Etats-Unis dans la productivité.
Le plan prévoit une augmentation des surfaces cultivables :
– de 30% pour le blé, – de 50% pour le maïs, – de 40% pour le soja.
La situation actuelle est la suivante :
Certaines de ces surfaces pourraient être converties en bonnes terres cultivables (15 millions d’hectares ?)
Ce texte est un extrait de la bibliothèque « Archives du CDI ». L’original et l’intégralité de ce texte sont disponibles à partir du lien suivant : 19810106-L’agriculture en l’an 2000 pour les hommes qui ont faim
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