Thème : HISTOIRE Mardi 16 Mai 2006
Par Michel Le Maignan – CDI, ancien lieutenant d’infanterie de l’armée française pendant cette campagne
La campagne d’Italie, débutée en décembre 1943, fut un moment pivot qui fit basculer la Seconde Guerre Mondiale. C’est alors que la victoire commença à changer de camp sur le front de l’Ouest. Cette campagne marqua également la renaissance de l’armée française, au plus bas après la déroute de juin 1940. Et pourtant, cet épisode est souvent ignoré des jeunes générations.
Le conflit mondial débute le 3 septembre 1939 quand les dirigeants français et britanniques déclarent la guerre à l’Allemagne qui vient de forcer les frontières polonaises. Pendant huit mois, il ne se passe grand-chose sur le front de l’Ouest, c’est la « Drôle de guerre ». Du côté français, on attend. Du côté nazi, on se prépare très activement. Le 10 mai 1940, les blindés allemands déferlent sur la France. En trente jours, l’armée française est pulvérisée. L’armistice est signé par Pétain et c’est le début de quatre années d’occupation nazie. Seuls quelques hommes – dont le général De Gaulle qui lance son appel le 18 juin sur les ondes de la BBC – estiment qu’il est encore possible de continuer la guerre en s’appuyant sur les colonies de l’empire français. Courant 1941, la domination des armées allemandes sur l’Europe est totale. Seule la Grande-Bretagne a résisté, au prix d’une bataille acharnée dans les airs. Pourtant, deux faits essentiels ont lieu durant cette année 1941. Le 22 juin, le pacte germano-soviétique, conclu en 1939 par Ribbentrop et Molotov, est rompu sans préavis par les allemands. Hitler décide d’envahir l’ensemble du territoire de l’URSS, ce qui constitue sa première grande faute stratégique. Il n’a pas retenu la leçon de Napoléon. Il est impossible d’envahir un territoire aussi vaste, soumis à une météo aussi rude. Dans le courant de 1942, l’armée allemande est bloquée aux portes de Moscou et Stalingrad. L’autre fait majeur de cette année 1941 est l’entrée en guerre des Etats-Unis, le 7 décembre, suite à l’attaque de la base de Pearl Harbour par les avions japonais.
Monte Cassino, une défense imprenable ?
La reconquête de l’Europe par les alliés commence en Afrique du nord. Les troupes anglaises, américaines et quelques français débarquent à Casablanca (Maroc) et à Alger (Algérie). Les combats font de nombreux morts à Casablanca où les troupes vichystes ont résisté. En Algérie, les soldats collaborationnistes se sont en revanche ralliés rapidement aux troupes alliées. Pour sécuriser leur position en Méditerranée, le commandement allié décide de débarquer en Sicile, tandis que d’autres divisions livreront bataille en Tunisie. Le débarquement en Sicile se déroule en juillet 1943. De là, les alliés attaquent le sud de l’Italie. Le général De Gaulle, qui souhaite recréer une armée française, propose aux Américains d’envoyer un groupe se battre à leurs côtés. En décembre 1943, un premier contingent de quatre divisions, soit 60 000 hommes, débarque autour de Naples. Ces forces françaises remonteront ensuite jusqu’à Rome, puis Sienne, avant de redescendre à Taranche d’où elles embarqueront pour la Provence, en août 1944. Parmi ces divisions figurait le régiment des chasseurs d’Afrique, constitué de huit pelotons. Jeune lieutenant de vingt-deux ans, je commandais l’un de ces pelotons de chasseurs de chars.
La progression des troupes alliées vers le nord était bloquée au niveau de Monte Cassino. Cette montagne formait l’un des points clés de la défense allemande. Le commandement allié, dirigé par le général Clark (USA), le général Alexander (Grande-Bretagne) et le général Juin (France) sous l’autorité du général américain, constata que cet obstacle était, en l’état, très difficilement franchissable. Le général Juin proposa qu’une de ses divisions, la 4e division marocaine de montagne (l’équivalent des chasseurs alpins français), passe par la montagne, prenne les défenses allemandes à revers, et fasse ainsi sauter le verrou.
La renaissance de l’armée française
(extrait du DVD « Les grandes batailles)
Après s’être positionnés le long du Garigliano, les troupes françaises montèrent vers les crêtes. Dans le silence, les tirailleurs marocains grimpèrent au front. L’heure H était fixée à 23 heures du 11 mai 1944. Les chars déversèrent un déluge de bombes sur les Allemands. Mais ces derniers résistèrent. Des combats farouches se déroulèrent toute la nuit. Au petit matin, seul un commando avait réussi à passer. Cela s’apparentait à un naufrage, les morts et les blessés se comptaient par centaines. Vers midi, une contre-attaque des Allemands fut stoppée et le général Juin ordonna de reprendre l’offensive. Il fallait reprendre le mont Maio. Finalement, la rupture fut faite, la ligne de défense Gustav fut enfoncée. Castel Forte tomba aux mains de Français. D’Alger, De Gaulle félicita chaleureusement Juin. Cette offensive avait permis à tout le front allié de se remettre en marche. Le 18 mai, les Polonais s’emparèrent du monastère de Monte Cassino. En cinq mois, la bataille pour cette prise avait fait 40 000 morts.
Les Allemands, en pleine retraite, furent pourchassés par l’aviation alliée. C’était la course pour atteindre Rome, que les Allemands évacuèrent en hâte. Dans la montagne, les goumiers du général Guillaume passaient de crête en crête. Le 4 juin 1944, les Américains entrèrent dans Rome, les Français étaient à Tivoli, dans la banlieue. Le 6 juin, à l’heure où le Débarquement en Normandie commençait, les troupes du général Juin défilaient dans Rome. « Sans vous, nous ne serions pas là », lui dit le général Clark. Les Allemands se retirèrent vers le Nord mais restèrent dangereux, détruisant les voies ferrées et les ponts. Dans les montagnes, les partisans italiens harcelaient les troupes en retraite. Le 13 juillet, le corps expéditionnaire français libéra Sienne, puis les plans alliés changèrent. Plutôt que de retourner vers le Nord et libérer la Tchécoslovaquie et l’Autriche, à la demande de Staline les alliés devaient concentrer leurs efforts sur le sud de la France, laissant l’est de l’Europe à l’Armée Rouge.
Le corps expéditionnaire français débarqua le mois suivant en Provence. Les généraux Clark et Alexander vinrent saluer cette drôle d’armée, débarquée dans l’indifférence quelques mois plus tôt dans la baie de Naples. Le général en chef Marshall adressa ce message à Clark : « Dites à vos combattants qu’ils ont fait revivre l’armée française que je connaissais, celle de la Marne et de Verdun. »
En savoir plus …
Coté Livres :
La campagne d’Italie 1943-1945 : Les victoires oubliées de la France
Auteur : Jean-Christophe Notin
Editeur : Librairie Académique Perrin
ISBN-10: 2262026319
http://www.amazon.fr/campagne-dItalie-1943-1945-victoires-oubli%C3%A9es/dp/2262026319
La campagne d’Italie, 1943-1944
Auteur : Henri de Brancion
Editeur : Presses de la Cité
ISBN-10: 225804183X
http://www.amazon.fr/campagne-dItalie-1943-1944-Henri-Brancion/dp/225804183X
Coté Web :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Seconde_Guerre_mondiale
http://www.junobeach.org/f/2/can-eve-rod-ita-f.htm
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