L’islam, son expansion, son influence sur le monde actuel

Thèmes: Civilisation, Histoire, Société                                                                                                         Conférence du jeudi 6 novembre 1986

CERCLE DE DOCUMENTATION ET D’INFORMATION

L’islam, son expansion, son influence sur le monde actuel,

les questions qu’il se pose, celles qu’il nous pose pour le proche avenir.

 

Ce jeudi 6 novembre, Monsieur Christian Marquant, Président des Amis de l’Histoire, nous a parlé de l’Islam.

Ce sujet brûlant et d’actualité intéressa bon nombre d’adhérents car la salle était comble.

Le sujet de cette conférence est l’Islam actuel, les problè­mes que nous rencontrons aujourd’hui. Je crois, nous dit Monsieur Mar­quant, que c’est un sujet qui intéresse beaucoup maintenant, mais qui intéressait beaucoup moins il y a seulement 10 ans.

 

Tant dans le domaine international que dans le domaine na­tional, ce problème de l’Islam nous interpelle tellement que nous vou­lons comprendre de manière à essayer de réagir. Nous connaissons très mal ce sujet car notre culture classique scolaire ou universitaire occultait totalement l’Islam.

Pour comprendre l’Islam actuel, Monsieur Marquant a estimé obligatoire de nous évoquer un peu d’histoire car tous ou presque tous les problèmes internationaux et nationaux qui se posent à nous face à l’Islam tirent leurs racines de problèmes historiques extrêmement lointains (années 600-640).

Il y a très peu de spécialistes de l’Islam, très peu d’enseignants, extrêmement peu de travaux sur ce sujet. Ceci s’explique par le handicap de la langue qui fait que pour accéder à une étude islamique un petit peu sérieuse, il faut maîtriser l’arabe parfaite­ment. Quant aux musulmans, ils refusent de porter un regard scientifi­que sur les « choses » de leur foi, c’est-à-dire sur le Coran, Mahomet ou même sur la toute première histoire de l’Islam. Un certain nombre de chercheurs français qui ont été arrêtés, voire même assassinés, l’ont été car ils avaient la prétention de vouloir passer au crible de la science contemporaine, la réalité islamique, ce qui est pour un musulman une profanation de la religion.

On ne peut pas étudier l’Islam comme on étudie le Christia­nisme. On n’appartient pas à l’Islam comme on appartient au Christia­nisme. Cela, l’Histoire l’explique.

Comment connaissons nous l’Islam ancien ?

  • A travers un texte : le Coran.
  • A travers celui qui a rédigé ce texte : Mahomet.

Or, premier problème, tout ce que l’on dit sur l’Islam actuel est fondé sur des bases qui ne sont pas solides, c’est-à-dire sur des documents, des traditions, des affirmations qui n’ont pas été passés au crible de la recherche scientifique. Tout ce que l’on sait de Mahomet et des 50 premières années de l’Islam qui sont fondamentales, est imprécis.

Les scientifiques en sont là, car toutes les choses de l’Islam étant considérées comme sacrées, toutes les recherches archéologiques en pays d’Islam, axées sur l’Islam, sont interdites. Donc, aucune fouille ne peut être faite à la Mecque ou à Médine par exemple, qui sont les deux villes où vécut le Prophète. Ces fouil­les permettraient cependant de comprendre quel était le milieu, l’atmosphère, les religions, les traditions dans lesquels vivait le Prophète Mahomet.

D’autre part, le Coran est un recueil des paroles du Pro­phète qui a été complètement remanié une trentaine d’années après la mort du Prophète par l’un de ses successeurs, le Calife Osman, qui était en guerre civile avec la moitié de la communauté musulma­ne. Cette moitié qui existe toujours, les Chi’ites, l’ont accusé jusqu’à aujourd’hui d’avoir manipulé le Coran à sa convenance. Les Corans antérieurs à Osman ont tous été brûlés.

Osman a non seulement enlevé des morceaux de Coran mais il l’a également trié. Il a pris des sourates (petits paragraphes) et les a classés par ordre de longueur décroissante.

Reste la tradition. Elle s’exprime par les Hadiths : c’est-à-dire des versets qui ont été répétés par les proches de Mahomet et qui exprimaient ses actes ou ses paroles.

Ces Hadiths se répartissent en Straths. Il y a également les Hadiths qui ont été écrits par ceux qui ont connu Mahomet, et puis par ceux qui ont connu ceux qui ont connu Mahomet …

Les derniers Hadiths ont été écrits au 14ème siècle, c’est-à-dire près de 600 ans après la mort du Prophète.

Actuellement dans l’Islam, il existe 2 tendances principales qui n’ont pas les mêmes Hadiths.

Donc, ce qu’est l’Islam est très peu connu. On le connaît mieux à travers la tendance Sunnite (Sunna en arabe voulant dire tradition) qui est celle d’à peu près 80 à 90% des musulmans. La tendance chi’ite (représentée par Khomeini) ne représente que 10% des musulmans.

L’Islam, c’est d’abord un homme : Mahomet. C’est un berger ou un chamelier de la Mecque en Arabie né vers 570-580. Il vécut dans une région un peu particulière. A cette époque, tout le pourtour méditerranéen et l’Asie proche étaient soit convertis au Christianisme, soit en passe de l’être. Or, justement dans le cœur de l’Arabie, le Christianisme n’avait pas encore pénétré. On était adepte d’une religion polythéiste* du judaïsme. La moitié des habitants de la Mecque et de Médine étaient juifs. Mahomet vit l’ange Gabriel qui lui dit : « Prêche l’existence d’Allah, le Tout-Puissant, qui a créé le monde ». Dès cet instant, Mahomet se sentit appelé à proclamer devant son peuple la grandeur d’Allah et à mettre fin au culte des idoles.

L’Islam va poser un problème au reste du monde, car ce Dieu est le même que celui qui a parlé à Abraham, à Moïse, et à travers Jésus. Donc, si l’Islam est juste, le Christianisme est complètement faux car si Dieu a reparlé, c’est que Jésus n’était pas Dieu. Les Mu­sulmans disent donc que Jésus était un Prophète.

Si l’on se place d’un point de vue chrétien où Jésus est le fils de Dieu, il n’est pas logique que Dieu qui parle à Mahomet contredise tout ce qu’il avait dit précédemment, car tout ce qui est dit dans le Coran est en contradiction avec la foi Chrétienne.

Mahomet prêche d’abord à la Mecque d’où il fut chassé en 622, puis à Médine où il vivra pendant 10 ans.

Le christianisme est une religion où l’on adhère individuel­lement. Si l’on n’y croit plus, on n’est plus Chrétien.

Etre Musulman c’est se rattacher au principe qu’Allah est le Dieu unique. Cette croyance nous rattache à la communauté des croyants. C’est l’uma.

On est Musulman pour la vie. La communauté ne peut pas admet­tre qu’un membre se désolidarise. Ceci explique que toute action mis­sionnaire en terre d’Islam a toujours été vouée à l’échec.

Comment Mahomet est-il passé de 3 fidèles à 50.000… fidèles ?

632 : Mahomet meurt. Il contrôle la Mecque, Médine, et l’é­quivalent de 4 ou 5 départements autour de ces villages. Mais ce sont des territoires désertiques.

635 : la moitié de la Syrie Palestine, l’actuel Israël, l’ac­tuel Liban, les 2/3 de la Syrie, la Jordanie, l’Arabie Saoudite, le Yémen et tous les Émirats du Golfe Persique sont musulmans. Tout cela en 3 ans.

Quasiment, tous les territoires qui deviendront musulmans au 7ème… 10ème siècle le seront par conquête militaire.

Un certain nombre de populations ont pu trouver dans l’Islam des caractères de simplicité, d’autres ont été contraints physiquement à se convertir, et la loi coranique distingue dans l’impôt les croyants et les non croyants.

Ces 3 causes font que l’Islam va conquérir des individus d’une façon irréversible pendant plus de 300 ans.

*Le plus grand nombre d’Arabes faisaient leurs dévotions à toutes sor­tes d’images de dieux et de déesses, à des blocs de pierre noirs, blancs ou rougeâtres, etc …

 

Si Mahomet n’a pas vu l’archange Gabriel, d’où tient il ce texte ?

50% des textes religieux du Coran sont des textes bibliques. Une des thèses admises par les chercheurs actuellement est que Mahomet devait être un arabe d’origine païenne qui par le biais de son épouse était devenu Juif. Il connaissait donc la Bible et les textes talmudi­ques. Si l’on suppose que l’archange Gabriel ne lui est pas apparu, soit par action raisonnée, soit par crise de mysticisme, il écrit ce qu’il connaît, c’est-à-dire la Bible et le Talmud.

Chose curieuse, il n’y a pas une seule citation de l’évangi­le ou du nouveau testament dans le texte de Mahomet. Bizarre pour un homme qui dit parler d’un Dieu qui reconnaît que Jésus est son prophè­te.

A la mort de Mahomet, 2 problèmes se posent à la communauté :

  • beaucoup de Musulmans considèrent que leur lien féodal avec Mahomet est rompu. C’est la guerre civile. Il faut la poigne d’acier des suc­cesseurs (califes), pour que dans un bain de sang, tous ceux qui s’opposent rentrent dans le rang.
  • qui va succéder à Mahomet ? La famille ou les compagnons de Mahomet ?

Après la mort de Mahomet, il y eut 4 successeurs, 4 califes.

D’abord Abou Bakr, le compagnon de toujours du Prophète, puis 2 ans plus tard, Omar. Othman lui succède, et enfin Ali, en 656.

Ali est tout à la fois cousin et gendre du Prophète, dont il avait épousé la fille Fatima. Mais Ali sera assassiné. A partir de ce moment-là la communauté se coupe en 2 : les fidèles des compagnons (Osman …) et ceux qui vont rester les partisans d’Ali.

Depuis 650, il y a donc déjà 2 Islams plus une multitude de sectes ; on en compte quelque soixante-dix qui présentent entre elles de grandes différences. Il n’en reste pas moins que, du point de vue spirituel, le Coran reste pour chacune d’entre elles le livre qui fait foi.

 

L’Islam aujourd’hui.

Les divisions qui existent sont exactement celles qui exis­taient depuis les 30 premières années de l’Islam. Il y a toujours en gros 2 communautés qui s’affrontent : les Sunnites et les Chi’ites.

Comme les Musulmans forment une communauté, il ne peut y avoir de Sunnites ou de Chi’ites isolés. Donc un pays est soit Sun­nite, soit Chi’ite ou alors les communautés sont groupées. Il y a par exemple des Chi’ites au Liban, mais aussi des Chrétiens, des Druzes, des Allavits … car ils se sont tous réfugiés dans les mon­tagnes, fuyant ainsi les Sunnites. Tous, contre « ceux du bas », sinon s’appréciaient, mais se toléraient. Ils s’entendaient bien ne serait-ce que pour que le percepteur sunnite venant de Damas ou de Beyrouth ne monte dans les villages.

Le problème de l’Islam, c’est en fait l’Ayatollah. Les Chi’ites ne représentent que 10% des Musulmans et sont considérés par les Sunnites comme des « fous ». L’hypothèse selon laquelle l’en­semble des 800 millions de Musulmans deviendraient Chi’ites est to­talement invraisemblable.

C’est aussi à travers l’histoire que l’on voit les deux mentalités musulmanes. Les disciples d’Ali s’étant considérés dès le début comme des martyrs, les Chi’ites d’Iran ont toujours été fana­tisés. Treize siècles après sa mort, les Chi’ites du monde entier continuent de nourrir une vénération particulière pour « Hussein al­Sayyed al-Shohada » (le prince des martyrs et fils d’Ali). On raconte qu’un jour le Prophète a pris le jeune Hussein sur ses genoux en lui disant : « Tu es mon agathe ». Agathe, couleur du sang, la couleur de Hussein. Lui qui va mourir d’une mort atroce symbolise pour tous les Chi’ites, le suprême sacrifice et les souffrances les plus épouvan­tables. Lors de l’Achoura (jour anniversaire de la mort d’Hussein), on peut voir dans les rues de Téhéran ces processions d’hommes se flagellant à coups de chaînes et de crochets, se tailladant le crâne à coup de couteaux, parfois jusqu’à la mort. Ils crient « Hussein » !

Les Sunnites, eux, sont des gens « tranquilles ».

 

Trois facteurs principaux ont justifié le renouveau islamique.

  • Facteur politique : les pays musulmans, il y a 50 ans, dans leur quasi-totalité, étaient des états qui n’existaient pas, soumis à des puissances coloniales européennes et n’ayant pas droit de cité. En acquérant leur indépendance, ils ont acquis droit de cité au ni­veau national et international.
  • Facteur démographique : quand les Français ont quitté l’Algérie en 1962, il y avait 9 millions d’Algériens. Maintenant, il y en a 30 millions. La population égyptienne croît tous les ans de 1,5 mil­lion.

Des populations négligeables quantitativement il y a 100 ans re­présentent maintenant 1/4 de l’humanité.

  • Facteur économique : l’O.P.E.P. était un groupement de pays dont la plupart étaient musulmans.

Pendant plusieurs années, ils ont cru qu’ils pouvaient imposer aux plus grands pays occidentaux un espèce d’embargo pétrolier. Ils ont ainsi accru une audience et des finances énormes. Des pays qui avaient des revenus misérables se sont retrouvés parmi les plus riches du monde

Les gouvernements des autres pays ont eu alors une politique pro islamique uniquement pour des raisons économiques.

En conclusion, Monsieur Marquant nous dit : « J’espère que l’alphabétisation, les pesanteurs sociales positives, feront que l’islam sera amené vers une version plus ouverte à l’humanisme. Mais je reconnais que le jour où l’humanisme sera la philosophie de l’Islam, l’Islam ne sera plus d’Islam ».

 

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