Thème : SCIENCES NATURELLES Mardi 8 février 2005
Les couleurs dans la vie de tous les jours
Par Claude Darras – Vice-président du CDI
Les couleurs font partie de l’homme. On a tous des sentiments sur les couleurs et on leur attribue des vertus, des vices, des symboles, et ce depuis l’Antiquité. La volonté de reproduire les couleurs est venue très tôt chez l’être humain mais il a fallu beaucoup de temps pour réussir ce défi. Des premières grottes à la télévision en passant par les tombeaux égyptiens, les vitraux dans les églises, la photographie ou le cinéma, l’homme a effectué une recherche permanente de la couleur.
L’origine du nom des couleurs
En français, les termes spécifiques aux couleurs sont peu nombreux, huit guère plus, mais ce sont des couleurs essentielles : vert, bleu, jaune, rouge, blanc, noir, gris et brun. Beaucoup d’appellations sont analogiques (fleurs, fruits, pierres) : rose, violet, orange, bordeaux, ivoire… D’autres doivent leur nom à leur origine géographique (rouge anglais, magenta, bleu de Prusse…) ou chimique (blanc de zinc, bleu cobalt, vert d’arsenic…). Tous ces termes définissent une tonalité mais il est possible d’y ajouter un qualificatif qui précise la clarté (clair, foncé) ou la luminosité (vif, pâle, sombre…). Ce n’est pas la même zone du cerveau qui permet d’apprécier la couleur de base et sa nuance. L’hémisphère gauche détermine la couleur, l’hémisphère droit détermine la teinte et traduit le côté émotionnel des couleurs. Le jeune enfant qui commence à nommer les couleurs ne se sert que du cerveau gauche puis, petit à petit, il apprendra à détailler ses sensations.
La couleur dans le langage de tous les jours
Notre langage reflète bien la place que prennent les couleurs dans notre vie, et cela de manière abusive. Nous employons des noms de couleurs pour des objets ou des événements dont le rapport avec la couleur nommée peut être très éloigné.
Le blanc, qui évoque la transparence, la pureté, est utilisé à tour de bras. Les exemples sont innombrables : sauce blanche, vin blanc, saison du blanc, blanchisserie, blanchir de l’argent, blanc comme neige…
Le noir, à l’inverse, évoque l’obscurité, la tristesse : idées noires, noircir la situation, broyer du noir, travail au noir…
Le rouge est plus approximatif dans son emploi. Il exprime des sentiments (rouge de plaisir, rouge de colère), l’interdiction (le feu rouge)…
Le vert prend aussi plusieurs sens. On est livide (vert de peur), on reçoit une volée de bois vert, on se fait engueuler vertement mais on se met au vert, une décision se joue sur tapis vert…
Le bleu est utilisé également pour dénommer des choses très diverses : la Grande Bleue, zone bleue, cordon bleu, un bleu (une ecchymose ou un novice), les nobles avaient le sang bleu…
Symboles et significations des couleurs
De tous temps, les hommes ont attribué des symboles aux couleurs. A Rome, le pourpre était réservé aux empereurs. La religion chrétienne donna très tôt un sens liturgique aux couleurs : saint Patrick, au Ve siècle, avait sélectionné les tons rouges, violets et noirs pour les vêtements des prêtres. Les jours de la semaine ont leurs couleurs : lundi (Lune = blanc), mardi (Mars = rouge), mercredi (Mercure = rouge pourpre), jeudi (Jupiter = bleu), vendredi (Vénus = vert), samedi (Saturne = gris) et dimanche (Soleil = jaune/or).
Chaque société a donné des significations aux couleurs. Voici quelques exemples :
Vert : en France, c’est la couleur des plantes, des « simples ». Le vert est apaisant, il évoque la nature. Mais pour certains, cette couleur porte malheur. Le vert pour les Croisés était la couleur de l’étendard des musulmans (qui était pour eux une couleur conquérante). C’est aussi une couleur « poison » car la teinte verte des céramiques et des peintures était obtenue par des sels d’arsenic. Les comédiens refusent d’avoir du vert dans les théâtres car Molière est mort en scène vêtu d’un costume vert.
Rouge : pour nous, c’est une couleur chaude, tonifiante mais pour les Maghrébins elle est apaisante. Le rouge évoque l’alerte, le danger, le sang. Les chasseurs alpins ne prononcent pas ce mot, à la place ils disent « bleu cerise ».
Bleu : cette couleur est arrivée tardivement dans l’histoire de l’humanité. Dans de nombreuses langues anciennes et langues primitives équatoriales et tropicales, le terme « bleu » n’existe pas, probablement en raison d’un phénomène photo toxique. Une haute dose d’ultra violet dans ces régions rendrait la vision du bleu difficile et serait associé au vert ou au gris. Le bleu fut longtemps très difficile à reproduire. Les Egyptiens broyaient du lappi-lazuli pour obtenir cette couleur. En France, la mode du bleu n’est apparue qu’au XIIe siècle, en même temps que l’on apprenait à fabriquer du pastel bleu dans le pays de Cocagne. Ce procédé fut ensuite remplacé par l’indigo, importé d’Inde. Mais cette rareté fait que le bleu était réservé aux rois de France et aux représentations de la Vierge Marie.
Le bleu aujourd’hui est un procédé chimique. C’est devenu la couleur préférée des Européens (50%), loin devant le rouge (30%) et le vert (10%).
Quelle influence la couleur a-t-elle sur notre santé et notre santé ?
Pour les occidentaux, le rouge est vécu comme une couleur chaude et le bleu comme une couleur froide. Or, physiquement, c’est l’inverse. Le « radiateur des couleurs » indique qu’il faut une température de 800° pour produire du rouge (orange, 1000° ; jaune, 2500° ; blanc, 6000°) et qu’il faut atteindre 10 000° pour le bleu. En physique, le bleu est donc une couleur chaude. Mais le corps réagit à l’opposé de la température de la couleur ambiante. Ainsi, si une lumière rouge est diffusée, couleur faiblement énergique créant un rayonnement froid, alors le corps réagit à l’opposé d’où une sensation de chaud.
En optique, il est important de savoir qu’il ne faut pas porter de teintes de n’importe quelle couleur. Le brun-rouge est excellent pour les maladies rétiniennes, les verres orange sont efficaces en cas dé début de cataracte. Les verres bleus sont à proscrire.
En 1958, le docteur Cremer a montré que la jaunisse du nouveau-né se soigne très bien par la lumière bleue. Plus récemment, en 1985, une étude a démontré que la lumière rouge augmente le rythme cardiaque tandis que le vert le diminue. Les couleurs d’ambiance d’une pièce ne sont pas sans effet sur le comportement des gens. Un local peint en bleu procurera en sensation de fraîcheur. Les salles d’opération sont d’un pâle tranquillisant. On dit que le rouge est stimulant, qu’il favorise la créativité. Mais il peut aussi exciter, énerver. Dans une école, les élèves traversant un couloir rouge font plus de chahut que lorsqu’ils traversent les couloirs verts. Les couleurs ont clairement des effets sur notre organisme.
Quoiqu’il en soit, les hommes ne sont pas indifférents face aux couleurs, plus ou moins inconsciemment, soit par goût, par tradition, par des réactions physiologiques ou pour toute autre raison qui nous échappe. Pourtant, la couleur est un artefact, elle n’existe pas en soi. La couleur d’un objet dépend en fait de la lumière qu’il reçoit. Si on avait la vue d’un animal, nous n’évoquerions pas les couleurs comme nous le faisons. La couleur n’existe que dans notre œil. « Les couleurs sont faites par l’homme, pour son œil, son plaisir et son utilité ».
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